Histoire - culture sourde
Au Québec:
Les Sourds ne se considèrent
pas comme des personnes handicapées mais comme des membres d’une communauté culturelle distincte,
ayant en commun leur propre langue, leurs propres valeurs, leurs propres régles de comportement, leurs propres
traditions et leur propre identité.
Les membres de la culture sourde sont des Sourds ou se comportent commes les Sourds le font (identité):
c'est-à-dire qu'ils utilisent la langue des signes et partagent les opinions qu’ont les Sourds d’eux-mêmes
et des gens qui ne le sont pas.
Nous utilisons le "S" majuscule pour identifier le nom Sourd qui représente l'identité
sourde. Le "s" minuscule est utilisé pour l'adjectif sourd. (Ex: Un Sourd s'exprime.... ou Les
enfants sourds jouent...)
1) La langue
La langue des signes est une langue
où les gestes-signes représentent des mots.
Les mouvements des mains et des bras remplacent les éléments sonores du langage oral. Les yeux reçoivent
le message au lieu des oreilles . La combinaison de signes indiviuels en phrases représente seulement un
aspect de cette langue.
L’insistance, l’amplitude, la répétition, les mimiques du visage les accompagnant, la position du
corps procurent au langage force, couleur et nuance. C’est donc une langue qui n’est pas linéaire en ce
sens que plusieurs éléments peuvent être exprimés en même temps. La langue des
signes possède une grammaire et une syntaxe qui lui sont propres.
Le langage gestuel n’est pas une langue universel. Il diffère d’un pays à l’autre, et même
d’une communauté à l’autre.
2) Les valeurs
Les mains et les yeux sont très importants pour les Sourds; ils sont “sacrés”. Les institutions et
l’histoire tiennent aussi une grande place. Les Sourds adorent se retrouver au centre de loisirs, lors de tournois
sportifs ou de toutes autres activités.
3) Les régles
de comportement
Voici quelques régles/comportements
adoptés par les Sourds:
- toujours se parler ou se faire les signes en se faisant face;
- avoir des avertisseurs lumineux pour le téléphone et la porte;
- avoir le décodeur de sous-titrage pour la télévision et le téléscipteur pour
le téléphone;
- choisir une table éclairée dans un restaurant;
- enlever de la table les objets (pot de fleurs etc.) qui empêchent une bonne vision;
- avertir lorsque l’on quitte;
- avertir un Sourd en lui tapant sur l’épaule ou en agitant la main s’il est loin.
4) Les traditions
La tradition est une manière de penser, de faire ou d’agir, qui est un héritage du passé.
Parmi les autres manifestations ou activités importantes notons le festival des arts, les rencontres sportives,
les spectacles de théâtre, de mime et de danse reflet de la culture sourde. Il y a aussi les congrès/colloques,
la Société canadienne culturelle des Sourds ainsi que l’association des loisirs qui permettent aux
Sourds de se rencontrer ou de se réunir afin d’échanger sur leur vécu social et culturel.
5) L’identité
C’est d’abord s’identifier comme Sourds: accepter sa surdité et donc ne pas la cacher, utiliser la LSQ sans
gêne et l'utiliser moyens pour communiquer avec les entendants.
Une communauté est un groupe partageant des buts communs et y travaillant.
Habituellement chaque communauté occupe un territoire géographique particulier. Cette dernière
a aussi un certain degré de liberté dans l’organisation sociale de sa vie.
Toute personne qui s’identifie aux Sourds en recherchant leur compagnie et qui maîtrise la langue des signes
peut faire partie de la communauté sourde. Le degré de perte auditive n’est pas en soi un critère
d’appartenance à la communauté. On peut donc y retrouver des Sourds de naissance, des devenus Sourds
et même certains entendants. Lorsqu’une personne se voit attribuer un nom-signe, c’est la preuve authentique
d’appartenance à la communauté sourde.
Extrait-adaptation de l’Institut Raymond-Dewar,
Les ateliers de
communications, LSQ I, Guide de l’étudiant, Août 1991
Petit historique de la langue des signes
Les sourds existent depuis la nuit
des temps. Leur mode de communication , visuel-gestuel est aussi vieux que le monde.
Dans l'Europe médiévale, la marginalité du sourd fut bien réelle
mais peut être moins dure que celle du fou, du lépreux ou du paralytique. Dans leurs monastères,
les moines bénédictins astreints à la règle du silence
associaient parfois des sourds à leur activité productive, et comme eux, utilisaient un langage gestuel
pour communiquer. Suivant les lieux et les époques, l'église accordait aux sourds le droit au baptême
ou au mariage avec l'aide des signes ou à la confession par écrit.
Au Moyen-Age , on est sourd (et on est accepté ou
rejeté comme tel) ou on cesse miraculeusement de l'être. Face à une médecine sollicitée
mais impuissante dans ce domaine le miracle religieux nourrit le rêve d'une disparition de la surdité.
A partir du 16 siècle, pédagogues et philosophes passionnés
d'éducation relancent le débat sur l'intégration sociale des sourds : de quelle intégration
s'agit- il et quel doit en être le prix ? Jusqu'à la fin de l'ancien Régime, leurs interrogations recevront des réponses contradictoires.
Du 16 au 17 siècle, les pionniers de l'éducation des sourds
sont, à l'exception d'Etienne de Fay, entendants et percepteurs d'enfants de familles riches. Leur enseignement
repose surtout sur l'éducation de la parole. Ni ces enfants, ni leurs enseignants sont en contact avec la
communauté linguistique sourde.
L'abbé de l'Epée, en rencontrant deux sœurs sourdes-muettes,
va prendre conscience de l'importance capitale de la communication visuelle et gestuelle dans l'instruction comme
dans la vie quotidienne des enfants sourds. Il fonde à Paris en 1760
la première véritable
école pour sourds.
Il est le premier entendant à privilégier la connaissance du français écrit par rapport
à l'articulation en recourant pour ce faire au langage gestuel.
Cette démarche originale explique la vénération qu'ont pour lui les sourds de tous pays.
Ses successeurs:
Abbé Sicard : 1742-1822
Il est formé par l'abbé de l'Epée, mais méconnaît la langue des signes (L.S.F),
il ne comprend pas sa spécificité et pense l'améliorer en ajoutant des signes méthodiques.
Or les enfants sourds ne comprennent rien, et cela se solde par un échec.
Bébian : 1790-1834
Filleul de Sicard, il reprend les études de l'abbé de l'Epée. Il a appris très jeune
la L.S.F et la maîtrise parfaitement. Et décide d'abolir les signes méthodiques à l'enseignement
des jeunes sourds ,il les critique et montre leur inefficacité. Ce changement va se révéler
comme un véritable succès, puisqu'il obtient des
résultats supérieurs dans la compréhension et l'écriture du français.
De 1822 à 1880,il n'eut plus de successeurs.
1880: Congrès de
Milan
164 participants entendants et 1sourds
Tous ont voté l'interdiction
du recours aux signes.
D'où une virulente opposition entre ceux qui soutenaient Baron de Gérando et ceux en faveur de Bébian.
Autre orientation
:
Laurent Clerc, sourd et élève de Sicard ,est remarqué par le révérant Gallaudet qui cherche quelqu'un pour enseigner la L.S.F aux Etats Unis. Ainsi, Laurent Clerc part enseigner la L.S.F adaptée en anglais avec une base locale des
signes. D'où l'extraordinaire ressemblance entre la L.S.F et celle américaine (American Signs Language). La Gallaudet College est l'unique
université existante dans le monde réservée pour les personnes sourdes, tous les enseignements y sont dispensés
en A.S.L.
Laurent Clerc
Laurent Clerc fut un des élèves les plus doués de l'Abbé Sicard, et enseignait aux sourds à Paris. Clerc était sourd, un français très cultivé et très connu dans le monde des arts.
En 1816, il alla aux États-Unis avec Gallaudet pour l'aider à démarrer une école pour les sourds. Ils arrivèrent
à Hartford le 9 Aôut
1816.
Gallaudet ramena dans son pays ses nouvelles connaissances
acquises sur la méthode française du langage des signes et Clerc
put approfondir ses connaissances en Anglais.
Par sa culture impressionnante et sa personnalité carismique, Clerc
démentait ainsi le mythe commun qui disait que les sourds n'avaient pas de ressources intellectuelles.
Clerc voyagea dans plusieurs grandes villes, démontrant
ainsi l'énorme importance de la méthode française dans l'enseignement des sourds. Il donna
des leçons privées, et une de ses élèves était la nièce du général
Grant, qui apprit rapidement le langage des signes.
Les sponsors se montrèrent bénévolants, ce qui encouragea les donateurs privés à
suivre le même chemin, et les fonds publiques à affluer. On put enfin ouvrir une école pour
les sourds, à Hartford.
La première école
des sourds aux États-Unis
ouvrit ses portes le 15
avril 1817, avec Alice Cogswell parmi les sept premiers élèves.
C'est ainsi que fut importé aux États-Unis l'enseignement public pour les sourds, basé sur la méthode française.